Au cœur des vacances à Lomé, les tournois de football masculins enflamment chaque quartier. Cris de joie, chants improvisés, tam-tams et musique urbaine transforment les terrains de fortune en véritables arènes populaires. Mais un détail attire particulièrement l’attention cette année. Il s’agit notamment de la présence massive des jeunes filles dans les gradins. Curiosité, passion, envie de vivre l’ambiance… elles viennent nombreuses, donnant une nouvelle dimension à ces compétitions d’été.
Du lycée Tokoin-Solidarité à Wonyomé, en passant par Kodjindji, les tournois ZEMOZ, AV2M ou encore Bè League connaissent un succès fulgurant. Bien qu’entièrement masculins sur le terrain, ils rassemblent un public mixte et diversifié. Les filles, longtemps simples accompagnatrices, deviennent désormais de ferventes supportrices. Certaines y voient un divertissement, d’autres une occasion de sociabiliser. Mais pour quelques-unes, ces instants passés dans les gradins nourrissent déjà de grands rêves : intégrer un jour les Éperviers Dames et représenter le Togo au haut niveau.
L’ambiance des tournois masculins à Lomé
S’il y a une chose qui attire les filles vers ces tournois, c’est bien l’ambiance électrisante qui y règne. Les matchs dépassent largement le cadre sportif. Ils deviennent des fêtes populaires où se mêlent musique, danse et émotions fortes. « Quand tu es ici, tu sens la vibration du quartier, tu vis une énergie incroyable », raconte Kekeli, 17 ans, habituée du tournoi ZEMOZ.
Pour beaucoup, ces tournois à Lomé sont aussi une bouffée d’air face à l’ennui des vacances. Plutôt que de passer leurs journées enfermées à la maison, elles préfèrent plonger dans cette effervescence. « Sans ça, mes vacances seraient vides et monotones », confie Nadia, 16 ans, venue encourager ses amis à Wonyomé.
Même son de cloche pour Léonie. Pour elle, la raison principale pour laquelle elle se rend au terrain pour les tournois de vacances est de se faire des amies et d’oublier l’ennui de la maison.
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Mais au-delà du spectacle, les tournois de vacances à Lomé deviennent aussi un lieu de rencontres et d’amitiés nouvelles. Dans les gradins, autour des terrains ou après les matchs, des liens se créent. Vanessa, 19 ans, se souvient d’une rencontre. « J’ai rencontré ma meilleure amie ici l’année dernière. Aujourd’hui, on ne rate aucun match ensemble. »
Nombreuses sont également celles qui viennent soutenir un proche ou une équipe de quartier. Pour Mireille, 18 ans, impossible de rester à la maison lorsque son frère joue. « Je suis là pour supporter mon frère, c’est mon joueur préféré. Il est le meilleur. »
Enfin, certaines découvrent cet univers par hasard, invitées par une amie. Mais une fois plongées dans l’ambiance, elles deviennent elles-mêmes accrocs. « Une copine m’a traînée un soir à Wonyomé. Depuis, je ne peux plus m’en passer », sourit Stéphanie, 15 ans.
Ainsi, même si ces compétitions sont masculines, elles offrent aux filles une expérience collective unique, faite de partage, de joie et d’évasion. Mais pour certaines, cette simple curiosité se transforme en passion profonde.
Des gradins aux terrains
Derrière les cris des supportrices se cache un autre phénomène : l’éveil des ambitions sportives. En voyant leurs frères, cousins ou camarades briller sur le terrain, certaines filles se projettent déjà dans un avenir où elles seraient elles aussi actrices du jeu.
Larissa, 14 ans, habitante d’Attikoumé, raconte son rêve avec des étoiles dans les yeux. « Quand je regarde les garçons jouer, je m’imagine à leur place. Mon plus grand souhait, c’est de porter un jour le maillot des Éperviers Dames. »
Ces rêves sont nourris par la montée en puissance du football féminin à l’international. Les victoires du Nigéria, les performances de l’Afrique du Sud ou encore la détermination du Cameroun inspirent les jeunes Togolaises. « Si elles peuvent briller au niveau mondial, pourquoi pas nous ? », lance Déborah, 16 ans, de Tokoin.
Les parents, autrefois réticents, commencent également à changer de regard. Madame Safourat, mère d’une supportrice passionnée, confie : « J’avais peur que le football détourne ma fille de ses études. Mais en la voyant motivée et heureuse, je me rends compte que c’est une opportunité. »
Pour ces jeunes filles, le football n’est pas seulement un jeu. C’est un symbole d’émancipation et d’espoir. Elles voient dans ce sport la possibilité de voyager, de décrocher des bourses, mais surtout de faire briller le Togo sur la scène internationale.
Les tournois de vacances à Lomé demeurent masculins sur le terrain, mais l’histoire qui s’écrit autour d’eux est bien plus large. Les filles, venues pour l’ambiance ou pour encourager leurs proches, y découvrent une passion qui les dépasse. Aujourd’hui supportrices, demain peut-être championnes, elles sont déjà les héroïnes silencieuses d’une révolution sportive en marche.
Et si, dans quelques années, les Éperviers Dames comptaient parmi leurs rangs des joueuses dont le rêve est né dans les gradins de Tokoin, de Wonyomé ou de Bè ?